samedi 30 janvier 2016

La peinture de Daniel Peron






Daniel PERON

Depuis 20 ans, il tente de peindre l'individu et la multitude, la matière brute et la lumière intérieure, la foule errante, les voies parallèles, les mystères des origines et de la fin dernière... les "SEUILS", les fêlures qui font de nous d'éternels errants insatisfaits entre mondes réels et rêvés, entre soi et autrui, entre Vie et Mort, entre bonheur et malheur...

Hantises? Fantasmes? Obsessions? Il y a longtemps que la question ne se pose plus. Il reste un acte de peindre, nécessaire, qui fait naître, quelquefois, au bout d'un pinceau fragile, une parcelle de soi....ou tout simplement le plaisir et la douleur de créer.

Tout d'abord il a suivi des études d'Histoire, plusieurs années passées dans la nuit des labos photos pour s'ouvrir aux lumières de la palette (en passant par l'Ecole des Beaux-Arts de Boulogne sur mer). Son parcours s'est souvent tenu à l'écart des galeries, avec une préférence pour les salles publiques.





"Un peintre qui crée essentiellement une peinture figurative qu'on peut appeler fantastique, onirique, surréaliste,... Comme on veut... Bien que je ne sois pas insensible à toute forme d'art pourvu qu'elle me paraisse sincère et qu'elle provoque quelque chose en moi... Depuis toujours, je tente de peindre l'individu et la multitude, la matière brute et la lumière intérieure, l'arbre de vie, la femme et les racines, l'enfant et le devenir, la foule errante en quête de valeurs à retrouver, les voies parallèles, les mystères des origines et de la fin dernière... Les “SEUILS”, les félures, les passages qui font de nous d’ éternels errants insatisfaits entre mondes réels et rêvés , entre soi et autrui, entre Vie et Mort, entre bonheur et malheur... Un acte de peindre, nécessaire, à l'origine de rencontres furtives mais intenses, et qui fait naître, quelquefois, au bout d'un pinceau fragile, une parcelle de soi... ...ou tout simplement le plaisir et la douleur de créer..." Daniel Peron
































































































































mercredi 27 janvier 2016

Omar Khayyâm

Le monde musulman peut s'honorer d'un poète original, audacieux et qui peut aujourd'hui nous réjouir... 
Il s'agit de Omar Khayyâm, qui a vécu en Iran aux XIème-XIIème siècles de notre ère. Il est peut-être né en 1048 et peut-être décédé en 1131 à Nishapour, où se trouve son tombeau. C’est un des plus grands mathématiciens et astronomes de tous les temps.
C'est le premier mathématicien qui ait traité systématiquement des équations cubiques, en employant d'ailleurs des tracés de coniques pour déterminer le nombre des racines réelles et les évaluer approximativement. Outre son traité d'algèbre, Omar Khayyâm a écrit plusieurs textes sur l'extraction des racines cubiques et sur certaines définitions d'Euclide, et a construit des tables astronomiques...
Il a également composé des poèmes en langue persane (Robâiyât ou « Quatrains »), qui ont été publiés après sa mort.







Le mausolée de 

Omar Khayyam
à Nishapur en Iran

*****


Extrait de Samarcande ( roman) , d’Amin Maalouf qui expose les conflits supposés d’Omar Khayyâm avec ses deux célèbres contemporains : le grand vizir Nizan el-Molk, l’homme politique le plus important de l’époque, et Hassan Sabbah, prédicateur ismaélien, fondateur de la secte des Assassins.

« Quand Omar arrive, le débat est déjà engagé sur la question qui passionne alors les hommes de religion : « L’univers aurait-il pu être mieux créé ? » Ceux qui répondent « oui » se font accuser d’impiété, puisqu’ils insinuent que Dieu n’a pas suffisamment soigné son œuvre. Ceux qui répondent « non » se font également accuser d’impiété, puisqu’ils laissent entendre que le Très-Haut serait incapable de faire mieux. On discute ferme, on gesticule. Khayyam se contente d’observer distraitement les mimiques de chacun. Mais un orateur le nomme, fait l’éloge de son savoir et lui demande son opinion. Omar s’éclaircit la gorge. Il n’a pas encore prononcé la moindre syllabe que le grand cadi de Merv, qui n’a jamais apprécié la présence de Kahayyam dans sa ville, ni surtout les égards dont il est constamment entouré, bondit de sa place, pointant sur lui un doigt accusateur. - J’ignorais qu’un athée pouvait exprimer un avis sur les questions de notre foi ! Omar a un sourire las mais inquiet. - Qu’est-ce qui t’autorise à me traiter d’athée ? Attends au moins de m’avoir entendu ! - Je n’ai pas besoin d’entendre. N’est-ce pas à toi qu’on attribue ce vers : « Si Tu punis le mal que j’ai fait par le mal, quelle est la différence entre Toi et moi, dis ? »L’homme qui profère de telles paroles n’est-il pas un athée ? Omar hausse les épaules. - Si je ne croyais pas que Dieu existe, je ne m’adresserais pas à Lui ! - Sur ce ton ? ricane le cadi. - C’est aux sultans et aux cadis qu’il faut parler avec des circonlocutions. Pas au Créateur. Dieu est grand, Il n’a que faire de nos petits airs et de nos petites courbettes. Il m’a fait pensant, alors je pense, et je Lui livre sans dissimulation le fruit de ma pensée. »

(Amin Maalouf : Samarcande éditions Livre de Poche, 1989 p. 177-178)
Khayyam in Art Gallery Teheran
Ce qui est curieux, c'est l'interprétation que l'on peut donner – au cours des siècles, des années – à l'idée que l'on se fait d'un homme : poète libertin et sceptique pour Fitzgerald (1859), athée pour les uns, mystique pour les autres... Quoi de plus mystérieux, qu'un texte dont on peut faire ainsi plusieurs lectures... !

Omar Khayyâm était un soufi, en recherche de connaissance scientifique, autant que spirituelle... Il s'inscrivait ainsi dans une tradition qui fit des soufis les traducteurs et les transporteurs du savoir grec en Occident durant le Moyen Age.
Omar Khayyâm était musulman : la plupart des images des Rubayat sont issues du Coran...


(CVII)
Rubaiyat of Omar Khayyam.
Ill. Robert Stewart Sherriffs

« Autrefois, quand je fréquentais les mosquées,
je n'y prononçais aucune prière,
mais j'en revenais riche d'espoir.
Je vais toujours m'asseoir dans les mosquées,
où l'ombre est propice au sommeil. »



(CLIII)

« Puisque notre sort, ici-bas, est de souffrir puis de mourir,
ne devons-nous pas souhaiter de rendre le plus tôt possible à la terre notre corps misérable ?
Et notre âme, qu'Allah attend pour la juger selon ses mérites, dites-vous ?
Je vous répondrai là-dessus quand j'aurai été renseigné par quelqu'un revenant de chez les morts. »

Robert Stewart Sherriffs,
The Rubaiyat of Omar Khayyam


(CXLI)

« Contente-toi de savoir que tout est mystère :
la création du monde et la tienne,
la destinée du monde et la tienne.
Souris à ces mystères comme à un danger que tu mépriserais. »


« Ne crois pas que tu sauras quelque chose
quand tu auras franchi la porte de la Mort.
Paix à l'homme dans le noir silence de l'Au-Delà ! »



(XXV)

« Au printemps, je vais quelques fois m'asseoir à la lisière d'un champ fleuri.
Lorsqu'une belle jeune fille m'apporte une coupe de vin, je ne pense guère à mon salut.
Si j'avais cette préoccupation, je vaudrais moins qu'un chien. »

Rubaiyat-of-omar-khayyam Carl-Purcell

(CLXX)

« Luths, parfums et coupes,

lèvres, chevelures et longs yeux,
jouets que le Temps détruit, jouets !
Austérité, solitude et labeur,
méditation, prière et renoncement,
cendres que le Temps écrase, cendres ! »

C'est sur cette 170e pièce, comme en conclusion de ce qui précède, que se termine le recueil.

The Secret Of  Omar Khayyam

Page of illuminated manuscript by William Morris, illustrated by Edward Burne-Jones, 1870s

Herewith. canvas



dimanche 24 janvier 2016

La femme, à l'origine de la divinité ?

Des témoignages artistiques que nous ont laissés les chasseurs du Paléolithique, nous pourrions en déduire que la femme était vénérée comme une déesse.. En effet, c’est l’image de la femme qui prédomine...





Upper Paleolithic Female Figurine, Eastern Europe, ca. 12,000 B.C.E. carved from black steatite
Figurine of Goddess from Anatolian - from early Bronze Age, circa 2500–2300 BCE n




Jomon goddess figure, left side. (Japan's Jomon era  14,000 BC to about 300 BC)
Northern Iran, Amlash terracotta ido of fertiltyl ca ,1000 BC.

Les plus anciennes figurations féminines connues remontent aux environs de - 35 000...
Roc-aux-sorciers
Angle-sur-Langlin
Le premier « nu » féminin, a été réalisé il y a environ 33 000 ans : à la grotte Chauvet : niché derrière une stalactite, à 1,10 m du sol, on y voit le dessin d’une vulve et de jambes de femme qui épouse le contour d’un pendant rocheux de forme phallique.
Vénus de Lespugue
Plus tard, vers - 25 000, les représentations féminines deviennent apparemment plus fréquentes, et se retrouvent dans toute l’Europe, jusqu’à la Russie et la Sibérie. Si la femme orne aussi bien bas-reliefs que gravures, les statuettes sont sans doute les œuvres les plus spectaculaires dans ce domaine...

Il semble que certaines d'entre elles recevaient des offrandes, tandis que d'autres étaient ensevelies dans des petites fosses qui leur étaient destinées... Certaines étaient volontairement brisées à l'époque même de leur création, et dispersées dans l'habitat... La Vénus de Lespugue était plantée dans le sol à quelques mètres du foyer .
Art néolithique des Cyclades

jeudi 21 janvier 2016

Discutons avec Dante, de La Divine Comédie...


La peinture, intitulée « Discutons avec Dante de La Divine Comédie », est assez populaire sur Internet et les internautes se passionnent pour identifier chacune des 103 personnalités représentées sur la peinture.

Il s'agit d'une oeuvre d'art conjointement réalisée par trois peintres chinois, à savoir Dai Dudu, Li Tiezi et Zhang Jun'an. Ils ont peint 103 personnages (y compris eux-mêmes) de nationalités et d'époques différentes sur une toile de 6 m de long et 2,6 m de large.

On peut identifier facilement des personnalités chinoises et étrangères telles que Mao Zedong, Deng Xiaoping, Confucius, Bruce Lee, Liu Xiang, Dante, Karl Marx, Vladimir Ilyich Lenin, Vladimir Poutine, Napoléon Bonaparte, George W. Bush, Oussama Ben Laden, Adolf Hitler, Saddam Hussein, Pablo Picasso, Che Guevara, Marie Curie, Michel-Ange ou bien encore Auguste Rodin.

En plus de ces personnalités, on trouve également des éléments représentant les fruits de ''la sagesse humaine'', tels que le premier mouton cloné Dolly, la bombe atomique, le phonographe ainsi que la marmite rectangulaire chinoise marquée '' simuwu''. Des sites emblématiques tels que la Grande Muraille de Chine, la Pyramide d'Égypte ou bien encore les « pierres suspendues » de Stonehenge en Grande-Bretagne, sont également représentés sur cette peinture insolite.



Voici la solution !


1.Bill Gates, fondateur de Microsoft 2.Homère, poète grec 3.Cui Jian, chanteuse chinoise 4.Vladimir Lénine, révolutionnaire russe 5.Pavel Korchagin, artiste russe 6.Bill Clinton, ancien président américain 7.Pierre le Grand, dirigeant russe 8.Margaret Thatcher 9.Bruce Lee, acteur martial arts 10.Winston Churchill 11.Henri Matisse, artiste français 12.Gengis Khan, chef de guerre mongol 13.Napoléon Bonaparte, chef militaire française 14.Che Guevara, révolutionnaire marxiste 15.Fidel Castro, l’ancien dirigeant cubain 16.Marlon Brando, acteur 17.Yasser Arafat, l’ancien dirigeant palestinien 18.Jules César, empereur romain 19.Le général Claire Lee Chennault, WW II US aviateur 20.Luciano Pavarotti, chanteur 21.George W. Bush, l’ancien président américain 22.Le Prince Charles 23.Liu Xiang, coureur de haies olympique chinois 24.Kofi Annan, ancien Secrétaire général des Nations 25.Zhang An, le peintre 26.Mikhail Gorbachev, ancien dirigeant russe 27.Li Tiezi, le peintre 28.Dante Alighieri, poète florentin 29.Dai Dudu, le peintre 30.Pelé, footballeur brésilien 31.Guan Yu, chef de guerre chinois 32.Ramsès II, pharaon égyptien 33.Général Charles De Gaulle 34.Albert Nobel, chimiste suédois, fondateur du prix Nobel 35.Franklin Roosevelt, ancien président américain 36.Ernest Hemingway, écrivain américain 37.Elvis Presley, le chanteur américain 38.Robert Oppenheimer, physicien américain 39.William Shakespeare, dramaturge 40.Wolfgang Amadeus Mozart, compositeur 41.Steven Spielberg, réalisateur américain 42.Pablo Picasso, peintre espagnol 43.Marie Curie, physicien et pionnier de la radioactivité 44.Zhou Enlai, 1er Premier ministre de la République populaire de Chine 45.Johann Wolfgang Von Goethe, écrivain allemand 46.Lao-Tseu, philosophe chinois 47.Marilyn Monroe, actrice américaine 48.Salvador Dali, peintre espagnol 49.Douairière Cixi, ancien dirigeant de la Chine 50.Ariel Sharon, ancien Premier ministre israélien 51.Qi Baishi, peintre chinois 52.Qin Shi Huang, ancien empereur chinois 53.Mère Teresa, missionnaire catholique 54.Song Qingling, homme politique chinois 55.Rabindranath Tagore, poète indien 56.Otto Von Bismarck, homme d’État allemand 57.Run Run Shaw, le magnat des médias chinois 58.Jean-Jacques Rousseau, philosophe suisse 59.Audrey Hepburn, actrice 60.Ludwig Van Beethoven, compositeur allemand 61.Adolf Hitler, dirigeant nazi 62.Benito Mussolini, chef du gouvernement italien fasciste 63.Saddam Hussein, l’ancien président de l’Irak 64.Maxime Gorki, écrivain russe 65.Sun Yat-Sen, révolutionnaire chinois 66.Den Xiaoping, révolutionnaire chinois 67.Alexandre Pouchkine, auteur russe 68.Lu Xun, écrivain chinois 69.Joseph Staline, dirigeant de l’Union soviétique 70.Leonardo Da Vinci, peintre italien 71.Karl Marx, philosophe allemand 72.Friedrich Nietzsche, philosophe allemand 73.Abraham Lincoln, ancien président américain 74.Mao Zedong, dictateur chinois 75.Charlie Chaplin, acteur britannique 76.Henry Ford, fondateur de la Ford Motor Company 77.Lei Feng, soldat chinois 78.Norman Bethune, médecin canadien 79.Sigmund Freud, psychiatre autrichien 80.Juan Antonio Samaranch, ancien président du Comité international olympique 81.Chiang Kai Shek, général chinois 82.La Reine Elisabeth d’Angleterre 83.Léon Tolstoï, romancier russe 84.Li Bai, poète chinois 85.Corneliu Baba, peintre roumain 86.Auguste Rodin, artiste français 87.Dwight Eisenhower, ancien président américain 88.Michael Jordan, le joueur de basketball américain 89.Hideki Tojo, ancien Premier ministre japonais 90.Michel-Ange, peintre de la Renaissance italienne 91.Yi Sun-Sin, commandant des forces navales coréennes 92.Mike Tyson, le boxeur américain 93.Vladimir Poutine, Premier ministre russe 94.Hans Christian Andersen, écrivain danois 95.Shirley Temple, actrice américaine 96.Albert Einstein, physicien allemand 97.Moïse, l’hébreu chef religieux 98.Confucius, philosophe chinois 99.Gandhi, leader indien spirituell 100.Vincent Van Gogh, peintre hollandais 101.Toulouse-Lautrec, peintre français 102.Marcel Duchamp, artiste français

lundi 18 janvier 2016

La diversité des religions : une volonté divine.-2/2-

« C'est à l'entour des années conciliaires que la question fut posée de valeurs positives contenues dans les traditions elles-mêmes. Les théologiens répondaient d'ailleurs à cette question de façon diverses. Ils étaient en effet divisés sur la nature de pareilles valeurs positives : s'agissait-il de ''pierres d'attentes'', présentes dans l'homme religieux par nature ; ou bien, de façon plus affirmative, d'« d’éléments de vérité et de grâce », témoignant d'une initiative de Dieu vis à vis des hommes ? Le concile, en fonction,de son attitude ouverte mais discrète à la fois, n'a pas voulu trancher ce débat. » Jacques Dupuis (*) ( Conférence Louvain 1998)


Le contexte interreligieux soulève aujourd'hui, de façon nouvelle, - pour un catholique - trois questions sur:
  • L’ampleur du plan divin pour l'humanité, dans son unité et sa diversité ?
  • Le sens et la place dans ce plan divin global pour l'humanité de l’événement ' Jésus-Christ '( particulier dans l'histoire, et pourtant de portée universelle ) ?
  • Le sens et la valeurs salvifique, dans le même plan de Dieu pour l'humanité entière, d'autres ''voies'' de Salut se réclamant elles aussi de ''figures salvatrices''.. ?
Abraham

Le Pluralisme religieux dans lequel nous vivons aujourd'hui, peut être considéré comme un pluralisme de droit, auquel on peut reconnaître un sens positif dans le plan divin pour l'humanité. Le mystère de Dieu reste nécessairement au-delà de toute connaissance humaine et les religions représentent autant d'approches tâtonnantes des hommes face à ce mystère. Le mystère intime de Dieu consiste – pour le Chrétien – en une communion et une communication plénière entre personnes, Père, Fils, et Esprit.
La trinité immanente, ne suffit pas, comme telle, à établir le fondement du pluralisme religieux. C'est la à la ''trinité économique'' qui en est l'épanchement dans l'histoire des hommes, qu'il faut avoir recours. 
Les diverses traditions religieuses représentent en effet les diverses façons dont «  à bien des reprises et de bien des manières » ( He 1,1) Dieu a parlé et s'est prodigué aux hommes à travers l'histoire. Elles ne figurent pas seulement, ni d'abord, les efforts inlassables des hommes à la recherche de Dieu, mais bien plutôt les avances continues et multiples de Dieu à leur égard. Si elles constituent pour leurs membres des ''voies'' de salut, c'est que Dieu lui-même a d'abord tracé ces voies en se mettant à la recherche des hommes.
Stelle au dieu inconnu
Cela ne contredit aucunement l'unicité de Jésus-Christ que l'on a appelée «constitutive»; mais cette unicité doit aussi être entendue comme « relationnelle ». 
Cela veut dire que l'événement historique du Verbe fait chair, tandis qu'il marque l'engagement le plus profond et décisif de Dieu à l'égard du genre humain, s'insère nécessairement dans l'ensemble du plan organique de Dieu pour l'humanité. Les diverses composantes de ce plan unique et organique sont interdépendantes et relationnelles. L'événement Jésus-Christ, constitutif du salut pour tous, n'exclut ni n'inclut, en les absorbant, aucune autre figure ou tradition salvatrice. Il y a plus de vérité et de grâce divine à l'œuvre dans l'histoire des interventions de Dieu en faveur du genre humain qu'il ne s'en trouve dans la seule tradition chrétienne. Les autres traditions représentent par rapport à elle des dons divins supplémentaires et autonomes. Si l'événement Jésus-Christ mène l'histoire du salut à son apogée, ce n'est pas par substitution ou par remplacement, mais par confirmation et accomplissement.

On pourra alors parler de complémentarité et de convergence mutuelle entre le mystère de Jésus-Christ et les autres traditions religieuses. Non d'une complémentarité à sens unique, comme si les autres traditions ne contenaient que des «pierres d'attente» destinées à trouver leur «accomplissement» dans le mystère chrétien, mais bien d'une complémentarité réciproque susceptible d'ouvrir la voie à un enrichissement mutuel à travers un dialogue authentique. Une convergence aussi, historique et eschatologique à la fois. Historique, de par l'enrichissement mutuel qui est le fruit du dialogue; eschatologique, en ce que la plénitude eschatologique du Règne de Dieu est l'aboutissement final commun du christianisme et des autres religions.
Des jésuites reçus
par l'empereur moghol Akbar


(*) Note : Jacques Dupuis ( 1923-2005), est un prêtre jésuite belge et théoricien du dialogue interreligieux. Son expérience décisive a été un long séjour en Inde, de 1948 à 1984. A partir de 1984, il est professeur à la faculté de théologie de l'Université grégorienne de Rome. Il est consulteur au Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, de 1985 à 1995, et directeur de la revue Gregorianum.
En 1997, il publie un livre intitulé Vers une théologie chrétienne du pluralisme religieux, qui déclenche une tempête au sein de l'institution ecclésiale. L'auteur y développe l'idée selon laquelle le salut apporté par Jésus-Christ dépasse les frontières du christianisme et se manifeste également à travers d'autres religions. Une position qu'il résume par cette phrase : « Pour moi, Jésus-Christ est le sauveur universel, mais en même temps je crois que, dans le plan divin, les autres traditions religieuses du monde apportent une contribution positive à l'humanité. »


La Congrégation pour la doctrine de la foi (ex-Saint-Office) suspecte dans cette analyse un risque de "relativisme". En 1998, elle fait suspendre les cours du théologien à l'Université grégorienne. En septembre 2000, le cardinal Joseph Ratzinger, préfet de la Congrégation, publie un document intitulé Dominus Iesus, où il insiste sur le fait que la "fonction salvifique" du Christ est "exclusive, universelle et absolue".

vendredi 15 janvier 2016

La diversité des religions : une volonté divine -1/2-


A la Renaissance, déjà, Marsile Ficin (1433-1499) affirmait dans ses deux grands ouvrages, sa ''Theologia platonica''' et son ''De Christiana religione'' que la diversité des religions procèdent de la volonté divine. Ce fut la cas aussi de Nicolas de Cues, Pic de la Mirandole, Paracelse … Pourtant, une thèse bien vite abandonnée par la théologie catholique … au profit d'une beaucoup plus nette : ' Extra Ecclesiam nulla salus '(« Hors de l'Église il n'y a pas de salut »), expression latine de Cyprien de Carthage (200-258). Cette expression va avoir un grand succès au cours des âges, et sera reprise tout au long des siècles par les papes et les conciles pour indiquer que c'est seulement au sein de l'Église catholique que l'on peut trouver l'ensemble des « moyens du salut ».
« En dehors de l'Église catholique, personne ne peut être sauvé » Pape Pie IX (1846-1878), encyclique Quanto conficiamur moerore, paragraphes 7 et 8...
Abraham, Sarah, Isaac et Ismaël

Aujourd'hui, sur ce sujet, ce sont deux ''bonnes nouvelles'', qui viennent reprendre le chantier de la question de la ''vérité '' :
- La première vient de la communauté juive : plus précisément de 25 rabbins israéliens, américains et européens, conduits par le rabbin David Rosen de l’American Jewish Committee. Ils ont signé un document dont le titre était : Faire la volonté de notre Père aux cieux : vers un partenariat entre juifs et chrétien.
L’affirmation la plus saisissante est que « le christianisme n’est ni un accident, ni une erreur, mais le fruit d’une volonté divine et un cadeau fait aux nations ».
Ce texte a été publié le 11 décembre 2015, conjointement avec un autre présenté par le cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens (y compris avec les « frères aînés »), confirmant vigoureusement les orientations définies par Nostra Ætate (*).

(*) Note :
« L’Eglise  ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions ( Hindouisme, Bouddhisme, ..) . Elle considère avec un respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines qui, quoiqu’elles diffèrent en beaucoup de points de ce qu’elle-même tient et propose, cependant apportent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes. »
L'Eglise catholique reconnaît que le ''Verbe de Dieu'' a « semé ses semences » dans les traditions religieuses, mais ne dit pas qu'elles sont pour leurs adhérents des ''moyens du salut'', ou ''voies de salut''... Aussi, l'Eglise catholique refuse d'admettre que la diversité des religions est une volonté divine … !


- La deuxième ''Bonne Nouvelle'', c'est - en cette période troublée - la répétition de nombreux imams de cette même idée.
Pour l'Islam : la diversité des religions, ethnies et pensées correspond à la volonté divine, qui ne peut être dépourvue de Sagesse.
Dieu dit : « Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous avons fait de vous des peuples et des tribus »[Coran s 49 v 13 ],
« Et si ton Seigneur l’avait voulu, Il n’aurait fait des hommes qu’une seule communauté (de même confession). Or, ils ne cessent d’êtres différents, à l’exception de ceux auxquels ton Seigneur a accordé sa miséricorde. Et c’est bien pour être si différents qu’Il les a créés »[Coran s 11 v 118-119 ],

« Et si ton Seigneur l’avait voulu, tous les hommes peuplant la terre auraient, sans exception, embrassé Sa foi. Est-ce à toi de contraindre les hommes à devenir croyants ? »[Coran s 10 v 99 ]. 
Finalement, cette diversité n’est autre que le résultat du « libre choix » que Dieu a accordé aux hommes : « Croira qui voudra et niera qui voudra »[Coran s 18 v 29 ]. 
Ainsi, réprouver la diversité revient, à remettre en cause la Volonté et la Sagesse de Dieu.



A suivre avec La théologie du Pluralisme religieux – Jacques Dupuis sj

mardi 12 janvier 2016

Lecture de Monsieur Ouine de Bernanos -5/5-

Qui est vraiment ce Monsieur Ouine ?

Il « est venu d'on ne sait où, un soir. »... Monsieur Ouine a toutes les apparences du bon vieux monsieur, érudit, sympathique, maladif, de commerce agréable et parfaitement inoffensif. Sa place dans le récit s'annonce modeste ...
Le bruit court qu'il «  est un causeur exquis »
La tragédie qui compose M. Ouine est une fable... Une parabole... Fenouille n'est pas seulement un village d'Artos, c'est le monde ; ses habitants sont l'humanité ; nous sommes l'un d'eux … Le seul en qui nous ne pouvons pas nous reconnaître est Ouine... Nous ne nous reconnaissons pas en Satan … !
Ce vieux professeur retiré du monde, exerce une fascination sur ses élèves... Il n'est pas indifférent aux vies qui l'entourent …
Le jeune garçon que lui « apporte » Jambe de Laine excite sa curiosité, le trouble : « Je viens de me revoir moi-même, dit-il, comme un mort regarde dans le passé… Le petit garçon que j’étais, je l’ai vu, j’aurais pu le toucher, l’entendre… »
Mais, l'instant émotif passé, le nouveau venu est déjà une proie... Il ne brusque pas Steeny. C'est avec précaution qu'il assure son emprise, conduit son dessein, l'entreprise de destruction des âmes. . M. Ouine souille tout ce qu’il approche. Qu'il parle de l'enfance avec attendrissement, qu'il s'applique à défendre l'innocence, qu'il conseille ''amicalement'' un prêtre désemparé, ce n'est que procédé et calcul d'une démarche sciemment conduite pour jeter un trouble dans les esprits... Il dévore les âmes … « Je les ai convoitées » dit-il...
Dante - l'Enfer
Ouine n'est pas brutal. Accueillant, soucieux de tout arranger, disponible – le jeune curé voit arriver au presbytère un Ouine très amical, conciliant, coopératif – il est effacé, ne répond pas aux calomnies. Même, il veille à la santé morale des innocents et n'oublie pas de féliciter l'instituteur quand celui-ci veut épargner à ses élèves le spectacle scandaleux de l'enterrement. Peut-on concevoir plus exact portrait de l'ange déchu ?
Ouine ne fait pas peur. Pas plus que Satan n'est le cornu à fourche, il n'est pas un être répugnant. Il sait se faire oublier, être présent sans être là, habiter les esprits sans qu'ils aient l'impression de n'être pas libres... Et, il sait des choses que le village ignore...
Le personnage de M. Ouine est une synthèse de tous les héros bernanosiens en qui se manifeste le Mal : maquignon, mendiant, Fiodor, Saint-Marin ….
Devant la mort : aucun remord :
« L’idée qu’il dût regretter en mourant quoi que ce fût, renier une seule de ces heures dont chacune avait marqué un progrès vers la délivrance, la liberté totale, ne lui était pas encore venue. Et il était de moins en moins supposable qu’elle vînt jamais »
«  Au point où je me trouve, il ne me faudrait pas moins que toute une vie pour réussir à former un remords. Le mot lui-même a perdu son sens, »

Knud Andreassen Baade -Landscape in moonshine Evening, 1897, oil on canvas by Jakub Schikaneder


Ce roman empli du désespoir existentiel, est porté par plusieurs énigmes romanesques. On pourrait penser que ces intrigues obscurcissent le propos, conduisant le lecteur à des impasses

Peut-être Bernanos pense t-il qu'il n'est pas nécessaire de poursuivre des personnages au-delà de ce qu'il nous en dit … N'oublions pas que tout ce ceci n'est qu'une parabole... !

Vincent Van Gogh
Vincent Van Gogh

- Qui a tué le petit valet ?
Le hasard de l'accident ? Un maraudeur ? Il s'agirait vraiment d'un crime, et il y a des suspects... Monsieur Ouine, ce que témoigneraient les propos de Jambe de Laine, mais elle-même n'est pas très 'claire' .. ! Il y a aussi Eugène qui fait le coupable idéal...
Ce crime est une des grandes images de ce roman que le curé définit à la fin de son sermon : « Il a été l’instrument innocent de votre perte et c’est votre péché à tous... »

- Philippe ( le père de Steeny) est-il mort ?
Le père de Steeny est vivant... Anthelme et Miss l'affirment. Pourtant, il y a un doute. Ou, il ne serait qu'un ''drôle'', un ''toqué'' …

- Ouine est-il le père de Steeny ?
Le père de Steeny n'est pas pour Anthème un inconnu, même un ''vrai copain ''… La ressemblance entre Ouine jeune et Steeny …
William Blake Lucifer and the Pope in Hell
(The King of Babylon) about 1805

- Arsène s'est-il suicidé ?
« Sur les épais panneaux marron, recouverts d’une couche épaisse de poussière, la main du maire de Fenouille avait écrit en lettres capitales, mais d’un dessin puéril : ADIEU. » Sinon ; Arsène, le maire, est-il nécessairement devenu fou ? Est-il vraiment l’auteur des lettres anonymes ? Bernanos ne répond pas ...

- Jambe-de-Laine est-elle la maîtresse de M. Ouine ?
L'opinion de Mme Marchal ne fait aucun doute :  « il ne sortait plus d’ici, c’est qu’il y trouvait son plaisir. (…) – Ben ! Jambe-de-Laine, parbleu ! »
Jambe de Laine, semble la face femelle du Mal incarné par M. Ouine …

- Que devient Steeny ?
Ces quelques semaines racontées ici, sont pour Steeny un passage. Le drame de cet adolescent est sa solitude... Mais on ne saura rien de la suite, Bernanos nous abandonne devant la sensation du néant... ! Le but romanesque de Bernanos n’est pas le lecteur, mais la vie surnaturelle laissée au démon...
Odilon Redon 

Pour Bernanos, le désespoir ( peut-être même le nihilisme) n’est pas seulement une maladie, c’est un mal irrémédiable qui parachève la victoire du malin sur terre. Ce qui était victoire dans Sous le soleil de Satan devient triomphe dans Monsieur Ouine.
Le curé de Fenouille est impuissant, mais le médecin positiviste aussi.

« L’enfer, c’est le froid. (…)  Le diable, voyez-vous, c’est l’ami qui ne reste jamais jusqu’au bout… »nous dit le curé de Fenouille
La présence de Dieu ne se manifeste plus ici par la fulgurante irruption de la grâce dans la citadelle de l'âme... Mais, peut-être, sur la route, peut-on sentir le souffle divin ( d'un Dieu faible...) et comprendre le sens salvateur de cette aventure.. La voie est mystique, apophatique, paradoxale... Au delà du bien et du mal ...